Feel-good-sur-Mer
"Portrait d’un mental en friche, le film de Nora Fingscheidt émerveille autant qu’il sensibilise, et donne l’occasion à Saoirse Ronan de prouver une fois encore son immense talent.
De plus en plus présente sur nos écrans, la future trentenaire pourrait bien être la voix de notre génération. Ou plutôt, pour citer l’une de ses plus célèbres itérations, Hannah Horvath (Lena Dunham) de la série Girls, « une voix d’une génération ». La future trentenaire a du mal à rouler sa bosse, coincée entre les injonctions patriarcales et la dureté du monde capitaliste. La future trentenaire navigue généralement entre des traumatismes qui se répercutent sur son hygiène de vie et son rapport aux autres. Alors, va-t-on parler de Fleabag ? Non, il est ici question de Rona, une Écossaise originaire des Orcades, interprétée avec brio par Saoirse Ronan dans The Outrun.
Basé sur les mémoires d’Amy Liptrot, qui cosigne le scénario, le film dresse l’état des lieux psychique d’une femme en devenir. À Londres, où elle faisait jadis de la recherche, Rona a cédé tout entière aux démons de l’alcoolisme – une addiction qui, pendant longtemps, n’était représentée qu’à travers des cas masculins. Déclic, elle retourne dans son archipel, où l’attendent ses parents divorcés, un homme atteint de troubles bipolaires et une mère un brin zélote. Dès lors, il s’agira pour Rona de se reconstruire, au gré des saisons et de ses changements capillaires, cousine éloignée d’une Clementine d’Eternal Sunshine of the Spotless Mind.
The Outrun nous rappelle à quel point le sujet de la santé mentale a investi le débat public et transcendé les frontières. Si la représentation qui en est faite n’est pas des plus subtiles, elle a le mérite d’être frontale, de ne pas montrer trop d’indulgence envers cette protagoniste que Saoirse Ronan réussit sans peine à faire exister. Le tout dans un écrin bleuté des plus enchanteurs – pour vanter les charmes de l’Écosse, il est plus doué que n’importe quel spot touristique. Finalement, malgré les facilités, difficile de ne pas se laisser emporter par The Outrun, un film qui, de par sa structure, montre que la guérison n’est pas linéaire, et donne envie, inéluctablement, d’aller mieux." LÉON CATTAN
"Passant ainsi sans cesse du réalisme de la «rehab» à la rêverie naturaliste, le film gagne une ampleur imprévue, très littéraire et soudain très littérale, par la beauté du jeu de Saoirse Ronan et l’âpreté folle des Orcades." Libération